17/06/2019 : images de montagne et Joel Meyerowitz

juin 20, 2019 Martine Belmon

Ce soir, avant-dernière soirée avant la fin de cette année 2018-2019, nous avons deux activités au programme :

En 1ière partie, animée par Pierre et Fred, nous choisissons les images sur le thème « 4 saisons en montagne ».

Cette sélection donnera lieu à une exposition cet été à Saint sauveur sur Tinée. Merci aux participants …

Ensuite arrive le clou du spectacle ! Une présentation culturelle d’un photographe célèbre.

Ce soir Gérard nous présente JOEL MEYEROWITZ

Joel Meyerowitz nait en 1938 et grandit dans le Bronx, un quartier new-yorkais hétéroclite lui permettant d’affûter son œil de street photographe.

Voilà comment il raconte son coup de foudre pour la photographie de rue:

« En 1962, après des études d’histoire de l’art et de peinture, je deviens directeur artistique dans une agence de publicité à Manhattan. Mon patron m’envoie assister au shooting d’une plaquette que j’ai conçue sur les activités de deux préadolescentes après les cours. Le photographe s’appelle Robert Frank. Je ne le connais pas. L’observer dans son travail bouleverse ma vie. Pendant que les deux filles bougent librement, Frank se déplace en silence autour d’elles avec son Leica.

Avec très peu de mots,il les laisse vaquer à leurs occupations,puis silencieusement et sans effort,il s’accroupit,se balance,se glisse dans leurs activités et en sort sans les perturber. Posté derrière lui, j’entends chaque déclic. Soudain, je comprends que l’on peut arrêter le temps, figer le mouvement. Je découvre l’essence de cet art. Comme poignardé en plein coeur, je ressens une urgence. Je découvre qu’on peut bouger et shooter en même temps.La photo de rue,c’est du jazz !

Quand j’ai quitté le shooting et suis reparti dans la rue,tout me semblait différent .
Les gestes les plus simples semblaient chargés de potentiel : une main hélant un taxi,l’étreinte de gens se disant au revoir,une mère se penchant sur la poussette de son bébé pour lui mettre son chapeau,puis sa mimique de satisfaction.Tout ce que je vis alors me réveilla .Le lendemain je démissionnais. »

1962 – 1968 : prédominance du monochrome

Comme tous les photographes « sérieux » de cette époque, Meyerowitz privilégie le Noir et Blanc.

A partir de 1972 : LE PHOTOGRAPHE DE LA COULEUR

Si Joël Meyerowitz s’est adonné au noir et blanc à ses débuts, il a adopté la couleur définitivement en 1972. Et ce n’est pas anodin, les critiques de l’époque grincent des dents et hurlent à l’hérésie alors que peu de photographes délaissent le noir et blanc au profit de la couleur. A ce titre, Joel Meyerowitz tout comme Stephen Shore et William Eggleston, ont de par leur vision du médium, bouleversé à jamais l’univers de la photographie.

« En travaillant en couleurs dans la rue, dans les années 1970, je cherche une approche différente du noir et blanc. La couleur offre une description plus complète. Il faut prendre en compte tout ce qui est dans le cadre. Tous les éléments sont constitutifs de l’image. Je souhaite obtenir des photos pleines du chaos urbain new-yorkais, où tout est à la fois net, lisible et intéressant, du premier au dernier plan. Je veux rompre avec le moment décisif cher à Henri Cartier-Bresson et inventer mon propre chemin. »

Si Meyerowitz privilégie les interactions humaines, il ne dédaigne pas pour autant la scène urbaine, comme en témoignent ses photos d’ambiances

 

Joel Meyerowitz aime présenter son travail en Séries , en voici quelques unes :

Son premier livre, « Cape Light », publié en 1978, est devenu un classique de la photographie couleur et a été vendu à plus de 150.000 exemplaires.

 

L’Empire State Building vu sous tous les angles et à toutes les distances

L’artiste a été le seul photographe à pouvoir accéder aux ruines du World Trade Center juste après le 11 septembre 2001. Les images capturées à cette occasion sont une archive inestimable et un témoignage sans égal de l’histoire de Ground Zero. Elles ont été exposées dans plus de 200 villes et 60 pays.

Aujourd’hui, âgé de plus de 80 ans, il vit pour l’essentiel en Toscane.

Dans ses travaux les plus récents il met en scène des objets trouvés par hasard, qu’il dispose à la manière de personnages sur une scène de théâtre .

Influence évidente de Giorgio Morandi, peintre italien.

« C’est le genre de prise de vue que je réalise aujourd’hui dans ma maison, en Toscane. Celle-ci s’intitule Henchmen(Hommes de main). J’ai imaginé, au centre, un leader politique. Son profil ressemble à celui de Mussolini. J’ai pris cette photo avant son élection, mais il m’évoque aujourd’hui Donald Trump. C’est une sorte de parrain de la mafia entouré de ses lieutenants, les gars qui font le sale boulot. Face à ces objets en métal, j’ai disposé des éléments en bois. Je les déplace pour leur donner une énergie, une force. Cette composition s’inspire de mon expérience de street photographer. Je crée une nature morte qui a la même puissance qu’une scène observée dans la rue : la confrontation entre deux groupes d’individus, l’un plus vulnérable que l’autre. C’est une métaphore visuelle tirée de la réalité. »

Plus récemment, il développe deux projets photographiques avec des objets des ateliers de Paul Cézanne et de Giorgio Morandi.

Depuis le début de sa carrière, Joel Meyerowitz a publié plus d’une douzaine de livres et une rétrospective de son œuvre, « Taking my time » a été éditée par les éditions Phaidon en 2010. Il a par ailleurs produit et dirigé son premier film en 1998, Pop : le journal de son road-trip de trois semaines avec son fils, Sasha, et son père vieillissant, Hy.

L’un de ses livres les plus importants est Rétrospection.  Conçu à rebours de sa biographie, Rétrospection couvre toute la carrière de Joel Meyerowitz : depuis ses photographies les plus récentes dans l’atelier de Cézanne jusqu’à ses toutes premières images réalisées dans la rue il y a plus de cinquante ans. Les textes passionnants accompagnant ces images sont de Meyerowitz lui-même, qui livre le cheminement photographique et esthétique d’une vie, avec un sens du récit à nul autre pareil.

A voir et acheter ici : Rétrospection de Joel Meyerovitz, sur Amazon

Pour en savoir plus sur Joel Meyerowitz, voir ici son site web

 

Un grand merci à Gérard pour cette superbe et intéressante présentation  !